Les premières consultation ouvertes de l’IGF 2020 se tiendront en suisse du 14 au 16 janvier. Sélectionné il y a quelques mois par le secrétaire général des Nations Unies, António Guterres pour constituer le Groupe consultatif multipartite réfléchissant sur la gouvernance de l’internet, l’expert comorien, Karim Attoumani Mohamed revient pour Al-watwan sur les enjeux de cette réunion de haut niveau.
Al-watwan : Genève accueillera les premières consultations ouvertes de l’IGF 2020, de quoi va-t-on discuter lors de cet rendez-vous ?
Karim Attoumani: Genève abrite en effet plusieurs sièges des agences du Système des Nations Unies notamment le département des affaires économiques et sociales (Undsa) qui gère un volet pour le Forum sur la Gouvernance de l’Internet (Internet Governance Forum). Le prochain IGF mondial se déroulera en Pologne. Au cours de ces séances de travail nous allons nous lancer sur les activités préliminaires en attendant cette réunion prévue au mois de novembre prochain. Donc du 14 au 16 janvier, les participants se pencheront sur le choix des principaux thèmes, l’adoption de la nouvelle charte des forums des meilleures pratiques (Best Practice Forum), l’approbation des groupes de travail du Groupe consultatif multipartite (Multi Advisory Group) et enfin le projet des activités de l’année en cours jusqu’à la tenue de l’IGF.
Le Groupe consultatif multipartite dont vous êtes membre se réunira à cette occasion. Dites-nous un peu plus sur cette première rencontre du MAG ?
Il s’agira lors de cette réunion (et des prochaines) d’organiser les travaux préliminaires et toutes les consultations ouvertes au public et auprès de groupes techniques spécialisés afin de collecter les avis, les bonnes pratiques qui vont guider sur les choix des thématiques du programme de l’Igf2020. Avant le forum sur la gouvernance de l’internet, les membres de ce club composés de 50 experts issus des quatre coins du monde, travaillent à distance et se réunissent durant deux à trois fois si possible avant le forum global (IGF2020).
Quelles sont les missions de ce groupe d’experts?
En effet le Groupe consultatif multipartite (MAG) du Forum sur la gouvernance de l’Internet (IGF) a été créé par le Secrétaire général des Nations Unies en 2006 pour l’aider à convoquer la réunion annuelle de l’IGF. Ses membres sont tous des bénévoles qui ont accepté de préparer , d’élaborer le calendrier et le programme. Les autres missions assignées au Mag se déclinent ainsi : l’identification des thèmes, sous-thèmes , des questions en tenant compte des contributions de toutes les parties prenantes concernées. Nous organisons les sessions principales et participons si nécessaire à des groupes de travail thématiques dédiés. L’organisation des ateliers, la coordination des panels en appuyant les panélistes, les modérateurs et conférenciers lors de la réunion annuelle, la promotion du travail de l’Igf, auprès de toutes les parties prenantes relèvent toutes des rôles du Mag. Nous favorisons la participation et la collaboration de multiples parties prenantes aux réunions annuelles de l’IGF et aux travaux intersessions.
On parle surtout de gouvernance de l’Internet, quels sont les enjeux pour un pays comme les Comores ?
Avant de parler des enjeux pour les Comores en matière de Gouvernance de l’Internet, il faut tout d’abord expliquer brièvement le concept de la Gouvernance de l’Internet. “Il s’agit de l’élaboration et l’application conjointe par les États, le secteur privé, la société civile et les organisations internationales, des principes, normes, règles, procédures de prise de décision et programmes propres à façonner l’évolution et l’usage de l’Internet”. La gouvernance de l’Internet s’étale jusqu’au volet juridique et technique. Les réglementations et l’organisation de la gouvernance de l’Internet font l’objet de divers débats (FGI et réunions techniques diverses) entre les parties prenantes du Net, où se confrontent des visions différentes sur la manière de faciliter la libre communication des idées et des connaissances. Les enjeux auxquels font face les Comores sont nombreux : D’abord il faut s’organiser localement afin de pouvoir s’approprier du sujet notamment en ce qui concerne les décisions prises en matière de gouvernance de l’Internet sur le plan international. L’État, le secteur privé, la société civile, les universitaires et les consommateurs doivent être mieux armés pour pouvoir apporter leurs contributions dans tous espaces et sphères (régional et international). Pour cela, nous devrons arriver à organiser chaque année un Forum sur la Gouvernance de l’Internet aux Comores qui fait la synthèse de l’état de l’Internet, des usages, des différentes interactions entre parties prenantes (état, fournisseurs/opérateurs, consommateurs publics et privés pour ne citer que ceux-là. Durant un tel forum national, on y aborderait des problématiques inhérentes à l’Internet notamment l’état sur les infrastructures de l’Internet, la sécurité par rapport au cadre juridique, les piratages, la cybercriminalité, les droits et les politiques, le développement économique, la culture et la diversité comorienne en ligne notamment sur la création, la diffusion et l’utilisation de contenu et la coopération en matière de gestion des ressources critiques de l’Internet. D’ailleurs, plusieurs organismes accompagnent les parties prenantes que ça soit dans le renforcement de capacités, l’organisation et la participation dans tous les sommets et forums relatifs à la gouvernance de l’internet(Ig). L’UE, à travers son projet Prida, a même débloqué 8 Millions d’euros. Une partie de ces fonds sert à promouvoir la participation active des décideurs africains au débat mondial sur l’Ig. Le reste est utilisé dans l’évaluation de la situation continentale, l’identification des défis pour la participation africaine, les synergies entre les initiatives et le renforcement du Forum africain sur la gouvernance de l’Internet.
Pour pouvoir suivre le train notamment sur les questions de la gouvernance de l’Internet, les Comores doivent faire quoi en ce moment ?
C’est d’abord une question d’organisation. Il faudra sensibiliser les parties prenantes sur les problématiques à adresser. La démarche à suivre passera par des actions de renforcement de capacité afin de doter toutes les parties prenantes (gouvernement, parlementaires, opérateurs/fournisseurs, régulateurs sectoriels, consommateurs, universitaires, …) de compétences en matière de gouvernance de l’Internet pour que chacun puisse mieux contribuer aux débats et aux interactions. Il y a un pool de formateurs africains formés par le projet Prida dont je fais partie qui pourra être mobilisé afin d’animer des formations dans les pays ou durant des activités régionales comme les Igf régionaux. Les problématiques ne manquent pas et sont d’ordre d’actualité. Chaque jour on est en face d’actes criminelles en ligne, de vol d’identité, d’atteinte à la vie privée, de désinformation. Toutes ces questions ont des causes et des réponses locales mais elles sont un phénomène mondial. Comment nous nous organisons à éduquer le consommateur comorien à être en sécurité en ligne, à pouvoir tirer profit au maximum de l’Internet ? Comment faire en sorte à ce que les accès à Internet se développent ? Comment accompagnons-nous le parlementaire à comprendre les dimensions actuelles et des impacts de l’usage de l’Internet au quotidien dans la conception et la validation des lois ? Toutes ces préoccupations doivent être prises en compte au moment où une grande partie de la population a accès à Internet et est donc citoyen du cyberespace.
Encadré
C’est quoi l’IGF
Le Forum sur la gouvernance de l’Internet (IGF) a été créé selon les directives établies par l’Agenda de Tunis en 2005[1]. Il est convenu que ce nouveau forum aura pour but d’engager les multiples parties prenantes dans un dialogue sur la gouvernance de l’internet. Le premier Forum sur la gouvernance de l’Internet a pris place à Athènes du 30 octobre au 2 novembre 2006. Ce forum a été convoqué à la suite de la demande des participants du second Sommet mondial sur la société de l’information de Tunis en 2005. La direction et le financement de l’organisation sont sous la tutelle des Nations unies, mais elle n’est pas destinée à avoir de fonction de contrôle. Elle ne remplace pas non plus les mécanismes, institutions ou organisations déjà existants, faisant ainsi du forum un mécanisme neutre.